Après la cruelle expérience du séminaire, je suis entré le coeur inquiet à l'école publique de la Polyvalente du Cap (qui portera, plus tard, le nom de Académie Les Estacades), lieu ayant mauvaise réputation. 'Savez, les grosses polys de béton avec 3000 jeunes cordés un peu partout... Cette école m'a pourtant apporté beaucoup et a façonné ma future vie adulte. Deux professeurs en sont responsables.
À ma première année : Côme Cossette, enseignant en français, qui ressemblait un peu à Elvis Presley. Un jeune, plutôt calme. Je ne saurais dire ce qui se passait en classe, sauf que sa voix douce me donnait des frissons. Un jour, il demande la classique compo de 300 mots et je lui arrive avec le triple. J'ai récolté une mauvaise note pour ne pas avoir suivi la consigne, mais monsieur Cossette m'avait retenu en classe pour me dire, amicalement, que mon texte était bon et que je devrais écrire des histoires. À la fin de l'année scolaire, je lui présente mon premier roman : 500 pages. Ceci l'a sans doute étonné, mais cet homme, qui s'apprêtait à partir en vacances estivales, a pris le texte, l'a lu, m'a téléphoné en juillet, me demandant de le rejoindre chez lui pour en parler. D'autres s'en seraient lavé les mains, mais pas lui. Depuis ce jour, je ne cesse d'obéir à Côme Cossette : j'écris des histoires. L'année suivante, il n'était plus dans cette école et je ne l'ai jamais revu de ma vie, comme je n'ai jamais rencontré un autre homme prénommé Côme.
L'année suivante : cours d'Histoire du Canada, avec Alain Dion. Pas calme, celui-là. Une tornade ! Au delà des écarts de voix, des exclamations, du va-et-vient dans tous les coins du local, il y avait une passion évidente pour ce qu'il enseignait. On n'écoutait pas un cours d'Alain Dion : on le vivait. Tous les élèves l'adoraient, car il était trippant. Si le premier m'a incité à devenir romancier, Alain Dion a semé dans mon coeur la petite graine du futur historien. Au cours des années 1990, lors de mon stage en enseignement à la polyvalente, Alain Dion était toujours présent. Il m'a reconnu, mais ne se souvenait pas de mon nom. J'ai alors pu lui tendre la main et le remercier.
Commentaires
C'est gentil.
J'adore quand tu nous racontes ces histoires-là, de ta vie : c'est toujours touchant et fortement ancré dans le réel derrière certaines pudeurs. C'est émouvant.