Quelle est ma motivation pour consacrer un article au restaurant L'Orange ? Elle est relative à l'article précédent (qui est le suivant, pour vous). J'ai passé une longue partie de ma vie avec ce lieu face à mes yeux. De plus, j'ai trouvé sur Internet cette photo formidable de la première année d'existence de L'Orange, en 1954. Bien sûr, l'ornement était de couleur orangée. On servait, en ce très petit lieu, la bouffe éclair de base : frites, hot-dogs, hamburgers, Coca Cola. N'oublions pas que la rue Fusey faisait alors partie de la route nationale et qu'une présentation aussi singulière était apte à inciter les voyageurs à arrêter.
Cette photo date de 1960. Premier agrandissement, afin d'offrir au public des repas plus substantiels. Notez, au centre, qu'on voit toujours l'orange d'origine. Cependant, le lieu présentait un problème : impossible d'ouvrir pendant l'hiver, car tout ceci était prévu pour des repas mangés à l'extérieur. Le cas fut réglé circa 1963-1964, alors que tout ceci a été emmuré. Dès lors, l'Orange pouvait survivre douze mois par année.
Est-ce que c'était bon? Pour un petit gars, il n'y avait rien de mieux. Joie de Mario B quand maman lui demandait de traverser à l'Orange pour acheter un sac de frites, qui étaient royales.
Une troisième transformation allait survenir vers la fin de la décennie : un immense cornet de frites (avec frites en beau bois!) allait être ajouté sur l'orange d'origine. C'était blanc, avec un gros fruit dessiné en son centre.
Une photo de mon frère Daniel, pour illustrer la courte distance entre chez moi et le restaurant, que l'on aperçoit de l'autre côté de la rue Fusey, avec de la neige sur le toit de l'orange.
Je me dois d'expliquer la présence du fichier audio : Come On Let's Go, par les McCoys, de 1966. Il y avait dans l'Orange un juke-box et j'ai alors eu l'impression qu'à chaque fois que je poussais la porte, cette chanson jouait. Il y avait un client qui en était friand. Même en entendant cette chanson aujourd'hui, je pense à l'Orange.
J'ai quitté la maison familiale en 1976, pour y revenir, en qualité de locataire, en 1985. Les choses avaient changé pour le restaurant... C'était devenu le rendez-vous des gars saouls qui sortaient des boîtes de nuit et désiraient manger. Ça criait et hurlait tant que ces manifestations me tiraient de mon sommeil. Une fois, il y eut un coup de feu.
La police se stationnait derrière la banque et je pouvais facilement les voir quand ils décidaient que le temps d'une juteuse contravention pour conduite en état d'ébriété était venu. Ils avaient un grand choix et n'avaient pas long à rouler.
L'été, il se dégageait de l'Orange une très forte odeur de graisse. C'était étouffant! Bref, le joyeux petit restau de mon enfance était devenu un repaire de crétins. Vers la fin des années 1980, un dimanche soir, alors que je jouais au p'tit hockey avec mes copains, un des gars laisse filer un cri : "L'Orange est en feu!" C'était avant tout la décoration blanche du cornet de frites qui disparaissait. Le sinistre avait débuté à la base de tout ceci, servant d'entrepôt au restaurant. L'intérieur a été peu touché, mais le lieu a dû fermer ses portes, le temps de démolir la ruine et de donner une couche de peinture.
Cependant, rien n'avait changé, à la réouverture : hommes ennivrés, cris, délices de la police. Vers la fin, c'était très sale tout autour. L'Orange a fermé ses portes et j'ai pu retrouver le sommeil. Le local a été fermé quelques années, avant qu'une artisane ne s'en porte acquéreure pour offrir ses produits et aussi donner des cours (je crois). L'orange 1954 a été enlevée, mais les alentours de l'ex restaurant sont demeurés. En plus propre, cependant.
Commentaires
C'était, en effet, le premier McDo de la ville, autour de 1972.
premier mac do ....
Merci Nikole. Il y a le suivant, dans le même esprit, puis il y en aura deux autres,.
Belle histoire. Toujours touchant de lire ce type de souvenirs C'est si émouvant. Jolis débuts (une bonne année, 1954 hé hé!). Merci.
Cela attirait assurément les regards ! Surtout ceux des enfants. L'ornement est demeuré présent jusqu'à la fin. Des employés y prenaient des commandes, puis la bouffe était préparée dans une petite cuisine, dans le fond du fruit.
Salut Mario, drôle d'histoire que cette orange qui distribuait des frittes.....J'aime bien la version 1954....