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Titre du blog : Mario Bergeron multicolore
Auteur : Mario3
Date de création : 21-12-2014
 
posté le 08-02-2017 à 04:04:37

Les secrets d'un romancier

 

J'ai 61 ans et j'écris des romans depuis l'âge de 16 ans. Il y a eu trois étapes dans mon apprentissage de romancier : les premiers pas maladroits et beaucoup d'improvisation (1972-1990) ; une approche davantage pensée et travaillée (1991-1998) ; maturation (1999 à aujourd'hui). J'imagine que tout ceci a donné naissance à un style Mario B. Mon plus récent éditeur m'a dit que j'étais un romancier professionnel et cela m'avait fait sourire, d'autant plus qu'il avait ajouté que je savais ce qui plaisait à une maison d'éditions. Encore plus rigolo, car je n'ai jamais, ô grand jamais, écrit une seule ligne en pensant que mon texte serait publié. Quoi qu'il en soit, je ne nie pas que j'ai appris beaucoup de choses à chacune des étapes : 1)- Développer des petits trucs 2)- Me discipliner 3)- J'ai appris ce qu'il ne fallait pas faire.

 

 

PLAN

Écrire un roman, c'est un voyage. Si on ne connaît pas la destination, c'est inutile de prendre la route. La première chose que je dois savoir, c'est la finale (Arrivée à la destination). Je ne suis pas le seul à penser ainsi et j'ai même déjà rencontré un auteur qui écrivait la finale, en premier lieu.  Mes romans ont tous des plans, qui est un peu la carte routière du voyage. Parfois, le plan est rigoureux et à d'autres occasions, ce sont les lignes directrices de chaque chapitre. Je ne déroge jamais du plan que j'ai établi.

 

 

PERSONNAGES

J'ai toujours répété que je n'écris pas des histoires, mais bien des personnages. Ceci, c'est l'influence du cinéma chez moi (entre autres les films de John Ford et de Marcel Pagnol.) Les personnages sont définis à même le plan. Ils ne changent jamais de caractère le long du voyage. Je sais que cela me plaît et que, dans les salons du livre, les gens me parlaient davantage des personnages que de l'histoire de mon roman. C'était un indice que j'avais réussi.

 

 

DIALOGUES

J'ai souvent croisé des romans avec des dialogues interminables, du style commençant à la page 43 et se terminant à la page 48. Un roman, ce n'est pas une pièce de théâtre. Les dialogues de mes romans sont toujours brefs, vont à l'essentiel, doivent être 1)- rigolos 2)- marquer une transition importante. Depuis deux années, mes dialogues se limitent à quatre répliques. Une bonne idée et c'est dommage de ne pas y avoir pensé avant. Cela va encore plus à l'essentiel.

 

 

PAS DE DIALOGUES

Écrire un roman sans dialogues est beaucoup plus difficile. À ce jour, j'en ai une douzaine, mais aucun n'a été publié. Mon présent éditeur semble vouloir lancer un autre livre sur le marché en 2017. Or, les deux manuscrits qu'il a entre les mains n'ont pas de dialogues. Enfin!

 

 

LE VOCABULAIRE

Je n'emploie pas de mots que je ne connais pas. Ne souriez pas : il y en a qui le font, le dictionnaire à leur portée, trouvant un terme pointu et l'incorporant dans leur texte, afin de paraître cultivé. Mes romans sont québécois, dans un français standard, où se faufilent des réalités québécoises Par exemple, le matin, les gens déjeunent, à midi, ils dînent et à cinq heures, ils soupent. Ce n'est pas le cas en France. Pour un roman se déroulant dans le passé, il y a des milles, et non des kilomètres.

Est-ce qu'il y a des mots d'argot ? Essentiellement dans les dialogues. Certains personnages ne peuvent, en toute logique, parler un français de qualité, de par leur éducation, leur culture, etc. Tout ceci dépend du roman. Pour celui que je suis en train d'écrire, les dialogues sont profondément jouals et j'adore le faire, même si je sais que les éditeurs détestent ça.

 

 

QUELLE PAGE BLANCHE ?

Merci à Tintin. Hergé publiait ses planches de Tintin dans une revue. À la dernière case, Tintin voyait quelque chose que nous ignorions. "Oh, capitaine! Regardez!" Pour savoir ce que Tintin avait vu, il fallait acheter le numéro suivant de la revue. Ceci, je l'ai mis en oeuvre au cours des années 1970. J'arrête d'écrire toujours au moment où il va se passer quelque chose. Ceci me donne l'assurance que dès le lendemain, je saurai immédiatement quoi écrire, sans avoir à réfléchir. Par exemple, il y a deux jours, dans le roman en cours, un copain de longue date visite deux autres personnages et dit : "Accompagnez-moi à Québec." J'ai cessé à ce moment et, le lendemain, je savais qu'il fallait raconter le voyage à Québec.

 

 

TEMPS

J'écris tous les jours. Quand je commence la création d'un roman, je ne prends aucun congé. Aucun. Il m'est déjà arrivé à quelques occasions de terminer un roman, de sortir une autre feuille et d'en commencer un autre immédiatement. Je ne passe pas mes journés à écrire : trente minutes au maximum. Par contre, le soir, je revois des romans déjà terminés, afin de les améliorer, car...

 

 

BROUILLON

Un roman terminé est un brouillon. C'est plein de mots qui se répètent, de passages déjà évoqués, de maladresses, car je ne fais pas attention à ces aspects en créant ce roman. Alors, je corrige. C'est un défi et cela m'amuse.

 

 

CE QUE LES ÉDITEURS M'ONT ENSEIGNÉ

Le tout premier éditeur m'avait dit que je gagnerais en efficacité en écrivant au temps présent, et non au passé simple, où des sons ont tendances à se répéter. Très vrai! Si bien que lorsque je croise un livre écrit au passé simple, je m'enfuis à toutes jambes.

Ils m'ont enseigné à éviter des sons répétitifs.

Ils m'ont aiguillé pour ne jamais répéter des mots dans une même phrase, paragraphe, page.

Ils m'ont appris à traquer les verbes être et avoir.

Les répétitions de toutes natures sont la hantise des éditeurs. Même si je n'écris pas pour eux, j'ai pris bonne note, car cela fait de moi un meilleur romancier.

 

 

THÈMES & CHAPITRES

La majorité de mes chapitres sont thématiques, n'abordant qu'un seul sujet, ou ils servent à se concentrer sur un seul personnage.

Le livre illustré ci-haut est un bon exemple. On y trouve 25 chapitres et chacun a un thème : amour, amitié, travail, hommes, femmes, enfants, épreuves, etc. Chacun des chapitres devient une petite histoire complète en soi.

Mes chapitres ont toujours le même nombre de pages : soit 20, soit 25. Bien sûr, après corrections, le nombre peut varier, mais il demeure approximatif de 20 ou de 25. Ceci me permet de me discipliner, d'écrire un chapitre en poursuivant un but. Pour le lectorat, cela devient une lecture plus harmonieuse, car ainsi, j'évite les longueurs.

 

 

CRÉATIVITÉ

Écrire un roman, c'est faire peuve de créativité. Ceci signifie surtout qu'un texte ne doit pas obligatoirement débuter au point A pour se terminer au point Z.

Le livre ci-haut reprenait une idée déjà présente dans Contes d'asphalte : il n'y a pas de chronologie temporelle, si bien que le personnage vedette peut avoir 32 ans dans un chapitre et 25 dans le suivant.

Dans Des trésors pour Marie-Lou, les seuls dialogues ont lieu entre le personnage Marie-Lou et moi-même. Pour nous engueuler, la plupart du temps!

Dans En attendant Joseph (et quelques autres), il y a alternance entre des passages narratifs à la première personne, puis d'autres descriptifs à la troisième. Ayant soumis ce texte à un éditeur, celui-ci m'avait répondu : "Tu vas mêler les lecteurs." Réflexion étonnante de la part d'un homme dont le métier est de diffuser de la littérature... J'ai toujours pensé que les lecteurs étaient des êtres intelligents. Ce n'était pas le cas de cet éditeur...

Dans Perles et chapelet, ce qui sépare les chapitres sont des extraits réels de journaux d'époque, puis, dans la première partie, des interventions de personnages extérieurs, servant surtout à prouver que mon personnage Jeanne est une incroyable menteuse.

Dans L'Héritage de Jeanne, les rêves fous du personnage Renée sont écrits en italique.

Bref, il faut varier la sauce, laisser l'imagination prendre place. Oui, des romans qui vont de A à Z, j'en ai écrit. Mais ne faire que cela deviendrait lassant. Écrire doit être un plaisir, et non un boulot routinier.

 

 

ROMAN HISTORIQUE

On m'a orné d'une étiquette : romancier historique. Je n'ai jamais utilisé ce terme. Ce n'est pas parce qu'un récit se déroule dans le passé qu'il est obligatoirement historique. Cependant, il y a des aspects maniaques chez moi, comme les films nommés dans L'Héritage de Jeanne qui sont précisément ceux présents dans les salles de Trois-Rivières au moment où il en est question dans le livre. Dans Le Pain de Guillaume, le nom du vaisseau emmenant Guillaume en Nouvelle-France est réel, tout comme le nom de Jeanne Aubert, véritable 'Fille du Roy'. Un roman comme Ce sera formidable est profondément branché sur le quotidien des gens de Trois-Rivières de la fin du 19e siècle, car j'ai alors consulté une grande quantité de journaux d'époque et ce que découvrais devenait souvent le thème de chaque chapitre.

Par contre, il m'est arrivé de dépeindre un événement dit historique faussement, car, il va de soi, les gens qui vivaient cet événement le faisaient avec leurs tripes et non selon l'interprétation future d'un historien. C'est le cas dans Petit Train du bonheur, où j'évoque le grand incendie de 1908 de Trois-Rivières, sans jamais le montrer, car, il va de soi, mes personnages ne se baladaient pas au milieu de l'incendie, mais s'étaient enfuis vers un endroit éloigné du sinistre.

 

Pour en savoir un peu plus sur mes deux plus récents romans, voici les liens :

 

http://marioromans.vefblog.net/

 

http://marioroman.vefblog.net/

 

Des questions ?

 

Les romans publiés :

Tremblay et fils (1996)

Le Petit Train du bonheur (1998)

Perles et chapelet (1999)

L'Héritage de Jeanne (2000)

Contes d'asphalte (2001)

Les Fleurs de Lyse (2002)

Des Trésors pour Marie-Lou (2003)

Ce sera formidable (2009)

Les bonnes soeurs (L'amour entre parenthèses) (2013)

Gros-Nez le quêteux (2015)

Le pain de Guillaume (2016)

 

Et une vingtaine d'autres qui ne sont pas publiés.

 

 

 

Commentaires

MarioB le 11-02-2017 à 16:51:54
C'est quelque chose qui se développe avec le temps. Écrire un roman, ce n'est pas un acte immédiat. Bonne chance.
mocasaki le 11-02-2017 à 11:46:09
Bonjour à vous,

j'ai lu attentivement vos explications sur l'écriture d'un roman . Merci à vous . J'ai tenté d'écrire un roman et je n'y suis pas arrivé ...la psychologie des personnages je n'y arrivais pas ... ils n'étaient pas crédibles à mes yeux... c'était un roman pour les enfants et ados... je garde cependant l'histoire en tête ..

je me suis plongée dans la poésie ...

et j'espère pouvoir en faire un recueil .

Encore Merci Mr Bergeron

Amitiés

MocasakiCalimero
MarioB le 08-02-2017 à 20:08:45
C'est mon mode d'emploi. Un autre tiendrait un autre discours.
jakin le 08-02-2017 à 17:17:57
Salut Mario, si l'envie me prend d'écrire un roman, j'ai le mode d'emploi....
Maritxan le 08-02-2017 à 15:40:47
Rectif : Je "prends", avec un "s" bien sûr. Je ne suis pas encore prête à devenir romancière. Rire1
Maritxan le 08-02-2017 à 14:30:42
Eh ben dis donc, il n'y a pas que trois lignes ici !

Très intéressant tout ce que tu dis, je prend bonne note. @+
MarioB le 08-02-2017 à 05:06:42
Matinale, Anaflore ?
anaflore le 08-02-2017 à 04:47:29
tu connais bien le parcours de l'édition .....à noter ....