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Titre du blog : Mario Bergeron multicolore
Auteur : Mario3
Date de création : 21-12-2014
 
posté le 26-05-2017 à 07:52:08

La langue française au Québec

 

 

 

MON ACCENT

Beaucoup de Français disent que les Québécois ont un accent. Faux! Nous en avons plusieurs, dans chaque région, tout comme une femme de Provence ne parle pas comme une autre de Normandie, tout comme les gens du Sénégal ont la leur, au même titre que ceux de Louisiane. Les accents, ce sont la survie de la culture dans un monde uniformisé par les médias.

 

 

 

JOUAL

Le terme Joual (Cheval) a été utilisé une première fois en 1959 par un journaliste, décriant le langage des Québécois. Il ne pensait pas que le mot deviendrait une fierté, une dizaine d'années plus tard, une identité propre au Québec. Films, chansons, théâtre, tout le monde parlait joual, jusqu'au jour où nous nous sommes rendu compte que cela nous isolait du reste de la Francophonie. Joual pas mort, cependant, et on le retrouve chez des humoristes et certains chanteurs contemporains. Le joual fait partie de ma culture et je suis fier d'utiliser certains mots.

 

 

 

ANCIEN FRANÇAIS

Dans le magnifique film documentaire Pour la suite du monde (Circa 1962), des vieillards, vivant sur une île isolée, s'expriment avec un français si ancien que le film est en partie sous-titré. J'ai toujours pensé que ces hommes employaient le Français qui était de mise lors de leur enfance au 19e siècle et que c'était aussi un langage beaucoup plus ancien. Quoi qu'il en soit, un vieillard d'aujourd'hui ne parle plus ainsi. Il s'est passé quelque chose pour que se produise cette transformation.

 

 

 

MISE EN CONTEXTE

Le Québec est un îlot francophone isolé sur un continent anglophone. Ceux-ci contrôlant le commerce et l'industrie, ils ne se souciaient guère du langage employé par les gens dans leurs foyers. Je me souviens d'un visiteur de 1895, arrivant à Trois-Rivières, et se disant très étonné de voir que l'affichage des commerces était en anglais, dans une ville à 95 % française, dont le terme Three Rivers.

 

 

Autre exemple : Mon père n'a jamais nettoyé sa voiture : il la cleanait. Je devine que papa, ayant fréquenté l'école peu longtemps au cours de son enfance, a vu dans son usine une bouteille de nettoyant unlingue anglais, avec le mot Cleaner bien en vue. Alors, il a cleané sa bagnole. Les gens répètent ce qu'ils voient, cela même de nos jours. Sauf qu'aujourd'hui, nous avons l'excuse idéale de l'instruction pour ne pas le faire.

 

 

Je me souviens que dans les journaux des années 1910 à 1940, il y avait des efforts pour chasser les anglicismes. Sans trop de succès auprès du petit peuple. Cependant, si ces mots existaient à l'oral, je ne les ai jamais vus dans un journal ou une revue d'époque. Jamais. Ces publications étaient les oeuvres de la bourgeoisie des professions libérales, donc, de gens instruits.

 

 

 

OFFICE DE LA LANGUE FRANÇAISE

Là où l'élite bourgeoise avait échoué, l'Office de la Langue française, fondée en 1960, a graduellement réussi, à force de patience et de belles initiatives. On doit à cet organisme de jolies réussites de notre langue, comme Motoneige, Baladeur, Courriel.

 

 

LOI 101

Différentes lois pour protéger le Français sont nées dès la fin des années 1960, dans le mouvement des initiatives de l'Office, mais l'élection du Parti Québécois, en 1976, fait du Français, l'année suivante, la langue officielle du Québec, devant avoir priorité sur l'Anglais dans la sphère publique.

 

 

Ainsi, il est interdit, par cette loi, d'afficher quoi que ce soit en anglais, dont les raisons sociales des commerces, à part quelques exceptions. Des anglophones ont protesté, mais il s'agissait surtout de petites entreprises de Montréal. De façon générale, les méga entreprises ont collaboré. Ainsi, par exemple, McDonald n'affiche pas de menu en anglais. Déjà vu, dans un film français, un comédien plonger à pleines mains dans un baril de Kentucky Fried Chicken. Au Québec : Poulet frit Kentucky.

 

 

 

 

Dans le cas de l'affichage : ce que vous voyez ci-haut, photo prise dans mon quartier. Eh non, au Québec, il n'y a pas de Stop sur les panneaux, mais bien le mot français. Mine de rien, c'est une génération d'automobilistes qui font un arrêt et ne font pas un stop. C'est un anglicisme qui s'efface de notre culture.

 

 

 

Au Québec, il est interdit de présenter des produits unilingues anglais. Par exemple, il n'y a plus de Cleaner dans nos épiceries, mais un nettoyant. La plupart des directives de ces produits sont bilingues.

 

 

SOUVENIRS PERSONNELS

L'ado Mario parlait joual, utilisait le toé pis moé. Pas le Mario adulte. Je me souviens de termes qui étaient courants au cours de ma jeunesse et qui ne sont plus utilisés de nos jours. Par exemple, dans le monde de l'automobile. Plus de windshield, de bumper ou de gaz. L'on disait alors Parking, alors que de nos jours, on n'entend plus guère ce mot, remplacé par Stationnement. Je crois que c'est le contraire, en France.

 

 

Je pense que l'Office de la Langue française et la Loi 101, le temps d'une quarantaine d'années, ont changé, pour le meilleur, l'usage du français au Québec.

 

 

ANGLICISMES ?

Certes, il en existe encore! Des anglicismes sémantiques, particulièrement. Je me souviens de ce commentateur de baseball, à la télé, qui répétait sans cesse 'Oubliez ça', calque de l'anglais Forget It, et qui me tapait rudement sur les nerfs. De façon générale, les anglicismes ont largement diminué depuis mon adolescence, tout simplement pour la raison invoquée ci-haut : les gens répètent ce qu'ils voient. Or, s'ils ne voient que des mots français dans les médias, à l'épicerie du coin, ce sont des anglicismes qui disparaissent au profit d'une meilleure qualité de langue. Il y a maintenant beaucoup moins d'anglicismes au Québec qu'en France (Voir les deux articles suivants). Personne ne fait de shopping, au Québec. Des courses, des emplettes ou notre Magasinage.

 

 

ROMANCIER

Au cours des salons du livre, les visiteurs me demandaient souvent : Est-ce que c'est écrit en bon français ? C'était un signe. Il y a, dans certaines de mes publications, des passages jouals, mais seulement dans les dialogues, car mes personnages du passé n'avaient aucune raison de parler un français standard. Un de mes romans terminés récemment, Les Baveux, présente des dialogues joual et je suis fier de cette initiative et je prenais plaisir à dénicher le joual le plus tordu et vulgaire que je pouvais imaginer. Les quatre éditeurs auxquels je me suis frotté m'ont toujours dit que j'écrivais un français de belle qualité. J'en suis content, mais je ne dois pas oublier ma culture et mon histoire.

 

 

LE FICHIER AUDIO

Le Français est une langue magnifique et il faut la protéger, la cajoler, l'aimer. Un témoignage : Michel Rivard et sa chanson Le coeur de ma vie, un superbe texte rendant hommage à notre langue.

 

 

 

 

Commentaires

MarioB le 28-05-2017 à 19:07:22
JohnMarcel : Désolé, je ne sais pas ce que c'est.


Nikole : Merci pour tes observations justes. Je craignais, avec ces articles, insulter certaines personnes.
johnmarcel le 28-05-2017 à 12:21:43
Avez-vous déjà lu une des aventures du commissaire San-Antonio ?

Certaines contiennent plus d'argot que d'autre...

Ce n'est pas de la grande littérature, c'est de la littérature de café de gare comme le dit lui-même l'auteur Frédéric Dard...

Il utilise San-Antonio comme nom d'auteur sinon il utilisait son véritable nom pour ses autres romans...
Nikole-Krop le 28-05-2017 à 11:17:48
Bien que pensant être vigilante sur ce point, certains anglicismes me sont enracinés, et perdurent spontanément. Mais ton article et son "militantisme' me plaisent beaucoup. Tu montres, dans tes articles précédents, le ridicule, l'enflure et le snobisme de certaines expressions ! Et après tout, quand il y a en France un panneau : "Stop", on dit bien qu'on marque l'arrêt !
elena13 le 27-05-2017 à 10:55:30
Bravo pour la photo du jour !!!
MarioB le 26-05-2017 à 20:11:27
Le contraire existe et j'ai déjà croisé un film de France sous-titré. De plus, j'ai croisé des disques de Renaud avec, dans le livret, un lexique du vocabulaire.
johnmarcel le 26-05-2017 à 14:20:53
Je me souviens d'un feuilleton québécois diffusé à la télé française à la fin des années quatre-vingt... un des personnages, personne âgée, avait ses paroles sous-titrées alors que pour tous les autres on comprenait sans problème...

Et aussi, sur YouTube, j'ai pu voir un ou deux épisodes d'un feuilleton du Québec (je ne me souviens pas du titre mais je crois que l'acteur principal était un journaliste sportif spécialiste du hockey-sur-glace) dans lequel je ne comprenais pas toujours le français parlé...
elena13 le 26-05-2017 à 14:15:13
Merci pour ton histoire de la langue Française Mario !!!

Et merci de ton passage sur mon blog d'où ton commentaire de la traduction de la BD me fait beaucoup rire.