À une minute et trente-quatre secondes de chez moi, il y a la rue Notre-Dame. Elle est la base de ma ville de Cap-de-la-Madeleine et une des plus anciennes rues du Québec.
À l'époque de la Nouvelle-France, il n'y avait pas de routes. Les gens se déplaçaient en canot ou autre embarcation, sur le fleuve Saint-Laurent. D'ailleurs, tous les villages et seigneuries étaient sur le bord de ce cours d'eau. Cependant, il existait des chemins reliant des lieux proches les uns des autres. C'était le cas de la future rue Notre-Dame, reliée à Trois-Rivières. Cependant, vers la fin du régime français (18e siècle), tous ces tronçons furent réunis sous le nom de Chemin du Roy, la première 'route' de l'histoire du Québec.
La rue Notre-Dame en porte toujours la marque. La parcourir à pieds révèle de nombreuses surprises. D'abord, comme le chemin d'origine était le reflet des berges du fleuve, la rue zigzague en tous sens, avec des courbes, des côtes. Ensuite, elle est peu large. Le tracé actuel a sans doute était établi au 19e siècle, car il y avait une bonne raison de l'emprunter : se rendre au Sanctuaire du Cap. Cependant, une voiture à cheval dans un sens et une autre dans l'autre direction. Rien d'autre. La rue n'avait pas été prévue pour le trafic automobile. Un conducteur la parcourant aujourd'hui doit se montrer alerte au volant.
À l'origine une seigneurie, Cap-de-la-Madeleine devient un village au 19e siècle. Les maisons s'y établissent, quelques commerces. Avec le boum industriel du 20e siècle, des rues sont ouvertes vers le nord, mais la Notre-Dame demeure le coeur du lieu. On peut voir le résultat de nos jours : du point de vue architectural, c'est plutôt bâtard! Un pot-pourri de toutes les tendances depuis le 19e siècle. Par exemple, sur le tracé me menant vers mon terrain fantôme, on peut voir une maison du 19e, avec lucarnes, ayant comme voisine un bungalow tout à fait 1995. Le manoir seigneurial des pères Oblats (18e siècle) existe encore et a comme voisin un immeuble à logements d'une dizaine d'étages. C'est ainsi tout au long de la rue. De nos jours, la plupart des commerces de jadis n'existent plus.
Aussi : des arbres immenses, et, un kilomètre plus loin : rien du tout. Un magnifique terrain de belle pelouse et, deux coins de rue plus loin : un stationnement en rude asphalte.
La rue est si peu large qu'il y a eu problèmes pour établir des trottoirs. On peut marcher sur un de ceux-là, et, peu après : plus rien! Il faut traverser de l'autre côté pour trouver un autre trottoir.
Dépassé le site du sanctuaire, la rue a certes un air charmant de route de village. C'est très calme, bucolique et même les voitures semblent y rouler en silence. On peut même faire une collision avec un bourdon plein de haine.
De chez moi jusqu'à l'ex terrain de baseball, c'est près d'une demi-heure de marche. J'y vais lentement, tant il y a des choses à noter, un passé mignon qui voisine la modernité. Toutes les maisons ont des pelouses très vertes, des fleurs, de beaux arbres devant et derrière.
La photo ci-haut a été prise en 1912, avec un chien qui se repose au milieu de la rue. Il est évident que tous ces gens bien vêtus revenaient de la messe du sanctuaire. Ces maisons n'existent plus, remplacées par l'édifice de dix étages dont je vous ai parlé.
Photo du bas : de nos jours. Le petit sanctuaire établi par les Oblats dans la dernière moitié du 19e siècle existe encore. Derrière, on peut voir le gros sanctuaire, construit en 1960 et qui attire des pélerins de partout au Canada et des États-Unis. J'ai passé une partie de ma vie à me faire aborder par des Noirs yankees, me demandant : "Where's the shrine?"
Commentaires
Quand on en a tant dans la tête, non, c'est inutile !
Pas d'appareil photo. Rare, hein ?
Oui en te lisant j attendais des photos ...
Il me faudrait un appareil photo...
Ah j adore la description que tu fais de cette rue, et de son histoire ! ... marcher lentement et observer j aime aussi, et même sans marcher.
Bonne journée.
J'avais utilisé la photo,
Une rue que tu nous as déjà présenté...j'aime bien la deuxième photo, il se dégage une ambiance très anglicane....