Mario Bergeron multicolore

Quotidien, souvenirs, coups de coeur, etc.

posté le 12-07-2016 à 23:32:05

Iroquoisie, Tome 1

 

 

Iroquoisie est une recherche qui a duré une vingtaine d'années, de la part de Léo-Paul Desrosiers, romancier. Comme beaucoup de passionnés d'Histoire, l'homme n'avait pas de formation d'historien, d'où l'aspect un peu épars qu'on croise dans les quatre tomes. Seul ce premier tome a été publié, en 1947. Le second volume était prêt au cours de la décennie 1950, mais seuls quelques fragments ont été croisés dans des revues. Aucun éditeur ne voulait de ce livre. Pourquoi ?

Les livres d'Histoire de ce temps étaient avant tout des ouvrages propagandistes. Or, l'approche de Desrosiers ne tombait pas dans ce panneau, d'où l'aspect avant-gardiste de sa recherche. L'homme présentait des peuples amérindiens une image quelque peu inédite, souvent remplie de respect pour les cultures en cause. Par contre, quand il y avait des conneries, il le disait. Je me souviens de ce passage d'un tome subséquent où il dit, à mots voilés, qu'un certain gouverneur de la Nouvelle-France était un idiot.

Malgré les épreuves injustes, Desrosiers a complété cette fresque immense, mais il est décédé en 1967, sans avoir vu les trois derniers livres publiés. Ils ne le seront qu'en 1999, par la maison Septentrion, ayant trouvé les 2000 pages inédites, écrites à la main. Des retouches seront apportées, des précisions aussi. La recherche de Desrosiers était phénoménale : il s'est servi de tout ce qu'il a pu trouver, dont des documents provenant de Hollande (N'oublions pas que ce pays a eu une colonie en Amérique, au 17e siècle.)

Ce que l'on nomme Iroquois était en réalité cinq peuples ayant en commun une langue, une culture, et qui habitaient la partie sud et américaine du fleuve Saint-Laurent, entre l'actuel État de New York et Niagara. Le peuple en cause avec la Nouvelle-France a surtout été les Agniers. Le premier tome nous situe des découvertes de Jacques Cartier (1534) jusqu'à 1652. Quand Cartier arrive, les peuples iroquois habitent le Québec. La donnée change avec Champlain, au début du siècle suivant, alors que les Iroquois ont été refoulés vers le territoire que je viens de nommer par les Hurons et les Algonquins. Comme Champlain crée des alliances avec ces deux derniers peuples, les Iroquois ont tout de suite réalisé que ces européens étaient des ennemis.

Il y a cependant des nuances : les produits apportés par les Européens intéressaient les Iroquois, qui troquent en premier lieu avec les Hollandais, jusqu'à ce que ceux-ci baissent les prix. Il y a des tentatives de paix avec les Français, mais leur haine pour les Hurons et Algonquins semblait plus puissante que la raison. Je souligne qu'aucun Français n'a été tué par les Agniers avant 1652. Ce qui les intéressait, c'était exterminer leurs deux ennemis, pour avoir un territoire plus riche en pelleteries et, en quelque sorte, devenir maîtres de tous les peuples amérindiens.

 

 

 

Tout ceci est un peu complexe à résumer, mais fascinant à lire. Je termine par deux erreurs des Français : le désintérêt de la Couronne face à ce qui se passait dans leur colonie "sauvage" d'Amérique, puis l'arrivée des religieux, désireux de convertir les Hurons et Algonquins. Ces hommes de robe ont surtout apporté des épidémies qui ont détruit la puissante Huronie.

 

 

 

Comme extrait, voici le témoignage d'une femme huronne, prisonnière des Agniers, et dont les paroles ont été recueillies par des Hollandais.

 

Ils (Les Jésuites) se sont logés dans un tel village où tout le monde se portait bien ; sitôt qu'ils s'y sont établis, tout y est mort à la réserve de trois ou quatre personnes. Ils ont changé de lieu et il en est arrivé de même. Ils sont allés visiter les cabanes des autres bourgs, et il n'y a que celles où ils ne sont point entrés qui aient été exemptes de la mortalité et de la maladie.

 


 
 
posté le 12-07-2016 à 18:43:06

Iroquoisie, Tome 2

 

 

La période en cause va de 1652 à 1666. La Nouvelle-France est sur le bord du précipice. Paris ne répond pas aux demandes pour des soldats, pour des colons. Dans ce tome, nous croisons une période d'otages : j'en garde un et tu me l'échange contre un des miens, etc. Il y a des traités de paix, la plupart du temps très brefs et qui sont, pour les Agniers, des stratégies. Par exemple, quand ce peuple est opposé à d'autres amérindiens, ils n'ont pas le temps de guerroyer contre les Français. Alors, ils signent un traité pacifique, le temps de partir au combat ailleurs, mais ne le respectent pas, aussitôt la besogne accomplie. Ils en signent un particulièrement dégueu, qui était un prétexte pour ces gens de continuer à détruire les restes des Hurons, maintenant réfugiés près de Québec. Après quelques occasions du style, les Français ne voudront plus rien signer avec les Agniers, refuseront de les écouter, les jugeant fourbes et menteurs.

 

 

 

Au cours de la décennie 1660, cependant, le roi de France envoie dans sa colonie des enquêteurs qui répètent ce que les dirigeants locaux disaient depuis des décennies : c'est un territoire très riche, mais qui ne pourra se développer tant qu'il y aura un conflit entre Agniers et Français. Conséquemment, le roi envoie des militaires, des colons, des ouvriers et... des femmes ! (Les légendaires "Filles du roi".) Enfin, l'allié naturel des Agniers, les gens de la Nouvelle-Hollande, perdent leur colonie aux mains des Anglais. Bref, l'Iroquoisie est en mauvaise posture et les quatre peuples signent un traité de paix, d'où sont exclus ces têtus d'Agniers. L'Amérindien à l'origine de cette action est Garakonthié, un personnage très digne et intelligent, un peu le John F. Kennedy des Iroquois.

Parlons de guerre ! Les Iroquois étaient une confédération de cinq peuples distincts, ayant en commun une langue, des territoires voisins. Seuls les Onneyouts et surtout les Agniers faisaient la guerre à la Nouvelle-France. Les trois autres étaient plutôt amicaux. Pourquoi s'en prendre aux Français ? Parce que ces derniers avaient comme alliés les Hurons et les Algonquins, que les Agniers détestaient à s'en faire mal. Le territoire canadien (le Québec et l'Ontario actuels) était plus riche en gibier et donc en fourrures, que les Agniers troquaient à la Nouvelle-Hollande pour des armes à feu et des objets européens. Se débarasser des Français permetterait aux Agniers de profiter librement de ce territoire et, conséquemment, de s'enrichir, de devenir puissants. Il y avait aussi une ambition d'être le seul peuple amérindien d'importance dans cette partie de l'Amérique. Ainsi, les Agniers et Onneyouts s'en prenaient à des gens habitant plus loin, dont les Mohicans et les Abénakis, qui vivaient sur le territoire de la Nouvelle-Angleterre.

De quelle façon ces gens combattaient-ils ? Oubliez les scènes des films western américains ! Les peuples indigènes n'attaquaient jamais en groupe d'importance. S'ils partaient avec cent guerriers de leurs pays, arrivés à destination, ils se divisaient en petites unités. L'embuscade, tel était leur truc ! Ils se cachaient et hop, quand passait un Français, un Huron ou un Algonquin : couic ! Si, par contre, le groupe amérindien était inférieur en nombre à une bande ennemie, ils n'attaquaient pas. Je souligne que pour eux, une femme ou un enfant faisaient aussi partie des captures. Ces peuples faisaient des prisonniers : certains comme monnaie d'échange, les adolescents étaient intégrés au peuple victorieux, mais la plupart des adultes étaient torturés par le feu. Ce qui restait servait d'esclaves.

Il existait aussi de la stratégie militaire, comme dans le cas du siège de Trois-Rivières. Il y avait sur le fleuve Saint-Laurent des dizaines et des dizaines de canots agniers, attirant ainsi l'attention de mes ancêtres vers ce seul spectacle, alors qu'un autre groupe agnier approchait par le Nord, où c'était facile de pénétrer dans le bourg. Le hic est que Pierre Boucher y a pensé et a vite poussé ses canons vers le nord. Or, les Amérindiens détestaient profondémet les canons...

À une occasion, lors de la destruction des pays des Hurons, c'était plus spectaculaire et groupé. Agniers et Onneyouts attaquaient en masse les villages au cours de la nuit et brûlaient, tuaient tout ce qui bougeait. Ils jetaient dans le feu le bébés, les enfants, les femmes et les vieillards.

Les âmes sensibles sont priées de ne pas lire le passage suivant. Dans un village huron, les Agniers lançaient des bébés dans une marmite d'eau bouillante et obligaient les mères à bouffer les petits. Celles qui refusaient recevaient un coup de hache dans le visage. Brrr... Enfin, une française de Montréal, prisonnière des Agniers, s'est fait arracher les seins, couper les oreilles et on lui a enfoncé des tisons brûlants dans les yeux. Brrr, brrr...  Voici un extrait significatif sur la méthode de guerroyer des Agniers, provenant des Relations des Jésuites :

La façon que tiennent les Iroquois dans leurs guerres, est si cachée dans leurs approches, si subite dans leur exécution, et si prompte dans leur retraite, que d'ordinaire l'on apprend plus tôt leur départ que l'on a pu savoir leur venue. Ils viennent en renards dans les bois, qui les cachent et qui leur servent de fort inexpugnable. Ils attaquent en lions et comme ils surprennent quand on y pense le moins, ils ne trouvent point de résistance ; ils fuient en oiseaux, disparaissent plus tôt qu'ils ne paraissent.

 


 
 
posté le 12-07-2016 à 00:06:13

Iroquoisie, Tome 3

 

 

 

Le troisième tome d'Iroquoisie est le livre le plus politique du quatuor et celui où les Blancs n'ont pas réellement le beau rôle. La période évoquée va de 1666 à 1687, une vingtaine d'années qui, en principe, sont de paix, mais je n'ai rarement vu une paix aussi orageuse.

C'est au cours de ces années que la Nouvelle-France connaît son gouverneur le plus sage et avisé : Frontenac. Lui succèderont les deux pires : de La Barre et Denonville. D'ailleurs, l'auteur Desrosiers ne se prive pas de traiter ces deux derniers d'imbéciles, disant du premier  qu'il "Manque d'intelligence". À ces joyeux drilles s'ajoute Dongan, gouverneur de New York, très manipulateur. Ces quatre personnages agissent comme des conquérants supérieurs d'un peuple inférieur. De plus : un personnage extraordinaire : l'explorateur de La Salle, qui étend le territoire français jusqu'à l'embouchure du Mississippi et après cette conquête, le roi Louis XIV dira : "La découverte du Sieur de la Salle est fort inutile." M'ouais... On lui offre la moitié d'un continent et son altesse dit que c'est inutile... Au fait, ce cher Louis n'avait rien contre une guerre contre les iroquois, car il avait besoin d'esclaves pour ses galères. Si, si.

Le point de départ : une rare occasion où le roi répond à une demande d'un gouverneur : l'envoi de troupes militaires dans la colonie. Ces jeunes gens ne tueront aucun iroquois, mais brùleront trois villages, des champs, des réserves de maïs, jetant ainsi un effroi certain chez les cinq peuples iroquois. Il y aura illico signature d'un traité de paix avec la Nouvelle-France. Frontenac aura vite compris que ces gens sont impressionables et répétera des démonstrations militaires ou autres pour simplement jeter de la poudre aux yeux des Iroquois. Fin psychologue, Frontenac est le premier gouverneur à considérer les Iroquois comme des êtres humains, et non comme des barbares et des sauvages. Résultat : les Iroquois auront beaucoup de respect pour l'homme. 

Cependant, au cours de ces vingt années, il y a eu de multiples petites choses qui ont agacé les Iroquois. D'abord, par le traité de paix, l'Iroquoisie devient officiellemet territoire français et ses habitants sont des sujets français. On ne leur a pas demandé leur avis... Un peu plus tard, Dongan fera la même chose : l'Iroquoisie appartient à l'Angleterre. Second fait : les Iroquois vont chasser sur le territoire canadien (l'ancienne Huronie) et vont vendre les peaux chez les Anglais, à Albany, qui paient quatre fois plus que les Français. Pour contrer ce commerce, Frontenac fait construire, à l'entrée du lac Ontario, une forteresse munie de canons et qui porte le nom de Katarakouy, sur le chemin des chasseurs iroquois, qui, sous l'ombre des armes françaises, cessent de vendre à Albany, à moins de prendre un long détour. Frontenac fait bâtir un autre fort à Niagara, au coeur d'un territoire iroquois. Sans demander la permission, de nouveau ! Puis le traité de paix permettait aux missionaires catholiques de s'installer en Iroquoisie, ce qui a déplu à beaucoup d'Amérindiens... Enfin, lors de ses explorations, LaSalle signe des ententes commerciales et de paix avec les Illinois et les Miamis, deux peuples ennemis des Iroquois.

Les initiatives pacifiques de Frontenac sont détruites par de LaBarre et Denonville, militaristes, ayant comme objectif d'anéantir l'Iroquoisie. Leurs initiatives, spectaculaires mais gauches, sont ratées et les soldats ne font que répéter les gestes de 1666 : brûler des villages et des réserves alimentaires. Les Iroquois se tournent alors vers Dongan pour chercher protection et aide. Bref, ces deux Français ont tout mis en oeuvre pour que les Iroquois deviennent collaborateurs avec les Anglais, mais ceux-ci vont amplifier la connerie de prétendre que les Iroquois sont des sujets anglais, ce qui sera considéré comme une insulte par ces Amérindiens, désireux de garder leur indépendance.

Comme extrait : un tableau des moeurs des peuples iroquois, observés par un religieux.

Les nations iroquoises, pour entretenir la paix et l'union entre elles, et pour réparer les fautes que des particuliers pourraient faire, ont institué certaines embassades qu'elles s'envoient réciproquement les unes aux autres. Les nobles du pays fournissent les colliers de grains de nacre que l'on s'offre en ces occasions ; ils les exhibent d'abord aux assemblées des membres de leur famille ou clan ; ensuite, chaque clan les présente aux autres clans. À chaque réunion, le plus ancien ou le plus éloquent pérone à son aise ; son discours est sévère ou gai, il chante des chansons que l'auditoire répète, puis un festin a lieu. Les présents sont ensuite remis aux anciens, puis enfin aux ambassadeurs.

Ce rituel interne n'est pas dénudé d'un certain faste. Dans les autres tomes, lorsqu'il y a négociations entre iroquois et français, ces derniers repectent la tradition de ces peuples et y adhèrent. Il y a alors beaucoup d'échanges de présents, chacun symbolisant une décision. Les Amérindiens portent leurs plus beaux costumes et les délégués sont les chefs, sachems et autres sages de la nation en cause. Les cadeaux des Amérindiens sont souvent des parures, des bijoux, alors que les Français donnent des vêtements, des armes, de la nourriture.

 

Autre chose, pour les coeurs sensibles. Agrandissez l'illustration du livre pour voir une femme blanche sur le point de se faire fendre la tête par une hache, alors que son enfant reçoit une lance dans les côtes. Ah, aussi, dans ce tome, j'ai croisé un religieux français portant le doux nom de Zénoble Membré.

 


Commentaires

 

1. anaflore  le 12-07-2016 à 00:08:33  (site)

je note le nom on verra en septembre pour l'instant une semaine sur le ontinent pour la parade des grands voiliers du monde Hey

2. MarioB  le 12-07-2016 à 01:11:28  (site)

Hmmm... Je ne comprends pas trop...

 
 
 
posté le 11-07-2016 à 17:59:54

Iroquoisie, Tome 4

 

 

La période survolée dans ce dernier tome va de 1688 à 1701. Elle débute dans le sang, avec la vengeance des Iroquois suite aux conneries de Denonville, ayant incendié trois villages et brûlé des récoltes. Ce sera ce que les historiens ont nommé le "Massacre de Lachine", le raid le plus radical des peuples iroquois face aux Français et dont je vous reparlerai, à la fin de cet article.

La conséquence immédiate est que Denonville est démis de sa fonction de gouverneur par le roi, qui fait revenir Frontenac en Nouvelle-France. Heureuse décision ! Le but de Frontenac est la paix sur le territoire, non seulement avec les peuples iroquois, mais que ceux-ci fassent la paix avec les amérindiens alliés des Français. La manière d'y arriver : la guerre. Mais pas la guerre à grand déploiement, prouvée inutile sous Denonville et de La Barre. Frontenac fera la guerre aux iroquois... à l'iroquoise.

En même temps, il y a conflit entre la France et l'Angleterre, en Europe. Les colonies d'Amérique sont donc en guerre l'une contre l'autre. L'Iroquoisie est coincée entre les deux territoires. Nous avons vu que les cinq nations avaient signé des ententes avec les Anglais. Je précise ici que les colonies anglaises étaient indépendantes les unes des autres. Ce n'étaient pas des états unis, quoi ! La colonie ici en cause est celle de New York, pauvre en population et en soldats.

En réalité, ces gens se servent des Iroquois comme mercenaires. "Attaquez les Français!" claironnent-ils, sans pour cela prêter quelques soldats aux Amérindiens. Au fil de ces années, il y aura de la part de ces Anglais beaucoup de mensonges, de promesses non tenues et d'épouvantables attitudes de supériorité face aux "Sauvages". Entre autres, ils disent aux Iroquois : "Ne faites rien sans nous demander la permission." N'oublions pas que New York considère l'Iroquoisie comme faisant partie de son territoire et ses habitants comme des sujets anglais. Tout ceci finira par énormément agacer les cinq nations et mènera vers la paix avec les Français.

Revenons à Frontenac et à sa guerre à la façon iroquoise. L'embuscade de petits groupes, il n'y a rien de mieux ! Frontenac demande des soldats au roi, qui envoie ici des jeunes de 15-16 ans que le gouverneur n'utilisera presque pas. À la place : les Canadiens de souche, familiers avec la vie en forêt, avec la température, les cours d'eau. À ces Canadiens s'ajoutent les Amérindiens alliés, qui détestent les Iroquois. Frontenac propose un élément nouveau : l'appât du gain. En effet, pour chaque scalp iroquois rapporté à Québec, l'auteur du trophée reçoit une récompense.

Ça a fonctionné. En une dizaine d'années, les cinq peuples iroquois vont perdre la moitié de leurs guerriers. Les Agniers, si puissants et la terreur de la Nouvelle-France, seront les plus décimés. Précisons que pour les peuples iroquois, une guerre a une durée de six mois. Pas dix années.

En dernier lieu, les cinq nations en avaient ras-le-bol des mensonges des anglais, de leur attitude, puis des raids franco-alliés. Ils voulaient la paix, mais les Anglais leur disaient de ne pas y songer. Pour les Français, en conflit contre les Anglais, cela signifiaient être en guerre contre les alliés de ces derniers : les Iroquois. Les Français n'ont presque pas attaqué les bourgades de New York, alors que le roi désirait s'emparer de ce territoire.

Il ne faut pas se cacher que souvent, Frontenac a désobéi aux ordres de roi, entre autres quand un pacte de paix a été signé entre les deux pays ennemis en Europe. Frontenac n'en avait cure de ce qui se passait là-bas. Il poursuivait, pour atteindre son but. Malheureusement, il ne verra jamais le résultat : décès en 1698. Son successeur Callière, déjà son bras droit, allait respecter à la lettre la politique du grand homme.

L'objectif sera atteint en 1700 et une grande paix entre tous les peuples amérindiens sera signée l'année suivante, à Montréal, dans un déploiement de faste, avec autour de 1500 Amérindiens, vêtus de leurs plus belles parures, dans un climat sérieux, suivi de festins, de présents. L'Iroquoisie demeure un pays indépendant, mais la Nouvelle-France lui assure amitié et collaboration. De plus, en cas de conflit entre la France et l'Angleterre, l'Iroquosie restera neutre. Ce dernier point a pesé lourd dans la balance. En 2001, toujours à Montréal, l'anniversaire du 400e de la Grande Paix sera souligné.

Avant de passer à l'extrait à propos du Massacre de Lachine, je souligne que j'ai souvent croisé un fait que j'ai vu dans d'autres livres : plusieurs prisonniers français ne voulaient pas retourner en Nouvelle-France, persuadés que la vie parmi les Amérindiens était plus saine et juste. Il y a entre autres le cas d'un enfant pleurant à chaudes larmes parce que les Français l'ont réclamé, lors des cérémonies de la Grande paix. Le Massacre de Lachine, maintenant. Attention aux âmes sensibles...

 

L'armée iroquoise, forte de mille cinq cents guerriers (...) a descendu tout le fleuve dans le secret le plus absolu, sans donner l'alarme. Personne ne l'a vue ou repérée nulle part. Elle a navigué sur la rive droite (du fleuve Saint-Laurent), un peu au-dessus de la ville (Montréal) (...) Dans la nuit du 4 au 5 août, elle traverse le lac Saint-Louis au milieu d'un orage de pluie et de grêle. Elle arrive à Lachine, l'extrémité orientale de l'île. Puis, dans les ténèbres, elle se fragmente en une infinité de petits groupes qui se placent, chacun, tout près d'une maison (...) Le sommeil enveloppe toute la paroisse. Au signal donné, les Iroquois poussent leurs cris, leurs clameurs de guerre. Ils pénètrent dans les demeures et, en quelques minutes, c'est l'hécatombe sanglante (...) Les hommes d'abord sont mis à mort. Si les portes résistent, le feu enveloppe bientôt les maisons et ceux qui les habitent doivent en sortir pour tomber entre les mains des ennemis. Les plus heureux sont ceux qui sont abattus d'un coup de hache ou d'un coup de feu. Des enfants sont rôtis vivants, des femmes sont éventrées, empalées. Quatre-vingt-dix personnes sont brûlées. Plus de cent vingt prisonniers sont traînés en pays iroquois, pour le supplice par le feu.

 


Commentaires

 

1. jakin  le 12-07-2016 à 11:19:59  (site)

Une histoire sanguinaire qui est parfois retracée dans des films à grand spectacle du début des années 60....

2. MarioB  le 12-07-2016 à 23:33:04  (site)

Je ne sais trop. J'imagine, cependant, que la saga d'Iroquoisie ferait de très très bon films.

 
 
 
posté le 07-07-2016 à 17:56:36

Une ancêtre avec du caractère

 

 

 

Voici un extrait croustillant de Iroquoisie Tome 2. Nous sommes le 29 juillet 1652 et une montréalaise, Martine Messier, travaille aux champs, quand surprise par quelques iroquois. Les passages entre guillemets proviennent de l'homme qui a relaté cette histoire à l'époque, un père sulspicien du nom de Dollier de Casson.

Des Iroquois se glissent jusqu'à elle en rampant. Une cinquantaine sont à l'affût et l'entourent, postés à trois endroits différents. Trois d'entre eux entreprennent de la capturer. Mais étant d'un tempérament violent, "elle se mit à se défendre comme une lionne, encore qu'elle n'eut que ses pieds et ses mains." Au troisième ou quatrième coup de hache, elle tombe et semble morte. L'un des ennemis se penche sur elle pour la scalper, mais la femme reprend ses sens et, aux grands maux les grands remèdes, elle "saisit ce cruel avec tant de violence par un endroit que la pudeur nous défend de nommer" que cet Iroquois ne songe plus qu'à s'échapper ; elle tient bon jusqu'à ce qu'elle s'évanouisse de nouveau sous d'autres coups de hache. L'Iroquois fuit alors car, en plus, les Français accourent et sont bientôt sur les lieux. Comme Martine a reçu six coups de hache, dont aucun n'était heureusement mortel, l'un des Français l'embrasse par compassion ou admiration ; elle lui administre un soufflet. Lorsque cet homme lui explique son geste, elle s'écrie : "Parmenda, je croyais qu'il voulait me baiser !"

 

 

J'ai été intrigué par le mot Parmenda. J'ai retracé l'extrait complet du religieux, qui indique qu'il s'agit d'un mot de son patois. N'oublions pas qu'à cette époque, il y avait davantage de patois régionaux que de français standardisé.

 


Commentaires

 

1. jakin  le 11-07-2016 à 11:56:06  (site)

Salut Mario, un fait divers caractéristique dans ces contrées lointaines , rencontre de deux civilisations différentes....

2. MarioMusique  le 11-07-2016 à 15:28:41  (site)

Elle lui a coincé les trucs et il s'est enfui à toutes jambes ! Après, elle a tapé sur la gueule du type qui avait admiré son courage !

 
 
 
posté le 05-07-2016 à 12:49:35

La côte à deux fesses + La vacherie

 

 

Je crois bien que beaucoup d'éléments de lieux, partout dans le monde, sont nommés d'une façon officielle, mais que la population rebaptise d'une autre manière, remplaçant par des faits culturels propres à ces rues, terrains, maisons, etc. Cela peut-être des noms de personnes, mais aussi des traits d'humour, comme dans les deux cas relatifs à Trois-Rivières et que je vous présente. Fait intéressant, ces surnoms datent tous deux des années 1930 et ont été adoptés par plusieurs générations de natifs.

LA CÔTE À DEUX FESSES. Ne cherchez pas une telle appelation sur la carte de la ville... Par contre, vous pouvez la croiser, entre guillements, dans certains livres. Le vrai nom est : la côte Plouffe, mais si vous demandez à un trifluvien où se situe la côte Plouffe, il ne le saura peut-être pas, mais si vous dites la Côte à deux fesses, il lèvera le petit doigt, triomphant. La rue Plouffe, en son extrémité, rejoint le côteau du boulevard des Forges et se divise en deux parties. Une photo aérienne ou un dessin vous prouverait que cela ressemble à deux fesses : la gauche et la droite.

LA VACHERIE. C'est le pavillon agricole du terrain de l'Exposition (Notre photo). Les gens lui ont donné le nom de Vacherie tout simplement parce que lors de l'Expo agricole, on y croise des vaches. L'édifice a été construit en 1939, remplaçant un ancien pavillon agricole et peut-être que les gens du temps disaient déjà Vacherie, mais je n'en ai pas la preuve.  

Tags: #rue
 


Commentaires

 

1. Nikole-Krop  le 06-07-2016 à 10:02:43  (site)

C'est vrai qu'on rebaptise souvent, mais je n'ai de souvenir de ça qu'en matière "géographique" : la côte de Troyes, la Fourche ... Ah si, je me rappelle une anecdote : Je revenais un jour en train avec une connaissance qui, me montrant un lotissement social famille nombreuse, me demanda si je savais comment les gens appelaient ces maisons. Dénégation de ma part. "Les Castors". "Pourquoi?" demandai-je. "Parce qu'ils ont construit ces maisons avec leur queue" me répondit-il.

2. MarioBergeron  le 06-07-2016 à 11:54:12  (site)

Amusant ! Mwrci.

3. jakin  le 06-07-2016 à 12:37:43  (site)

Salut Mario, la ou il y a de la fesse, il n'y a pas de gène....au milieu de la côte, c'est la merde !

4. MarioMusique  le 06-07-2016 à 18:45:50  (site)

Vilain, vilain...

5. jakin  le 07-07-2016 à 04:09:44  (site)

Avec toutes mes excuses Mario, mais je n'ai pas pu résister à la blague.....

6. MarioB  le 07-07-2016 à 16:56:37  (site)

(Petit bonhomme jaune avec un sourire)

 
 
 
posté le 30-06-2016 à 16:14:42

Bûcherons 1 : Introduction

 

 

 

 

 

 

Dans la culture populaire : une grande part de notre héritage folklorique. L'Histoire nous apprend une autre réalité : un métier de misère, s'adressant à des pauvres gens, exploités par des compagnies de coupe de bois.

Les premières coupes à des fins industrielles datent de la décennie 1820 et se situent en Outaouais. Dans ma région, la Mauricie, le point de départ date de 1830 et l'envol de 1850. En premier lieu, le bois coupé était destiné au chauffage, à la construction de meubles, de bois de plancher. Dès lors, les billes de bois, qu'on appelait Pitounes, flottaient sur des rivières, avant d'atteindre les scieries et autres manufactures. Cette industrie allait se manifester dans toutes les régions nordiques du Québec : outre l'Outaouais et la Mauricie, ajoutons le Saguenay, le Lac Saint-Jean, la Côte-Nord et, plus tardivement, l'Abitibi.

En Mauricie, la première étape se déroule dans le proche arrière-pays de villes et de villages. Les données changent avec la décennie 1850, avec la vente massive de bois à l'Angleterre. Plus tard, autour de 1890, ce sera l'industrie des pâtes et papiers (pour la fabrication de papier journal) qui réclamera de plus en plus de pitounes. Toutes ces entreprises étaient dirigées par des anglophones, parfois par des Américains.

En Mauricie, la rivière utilisée était la Saint-Maurice, de 560 kilomètres. Tout l'arrière-pays était une immense forêt. Hors Trois-Rivières, près du fleuve Saint-Laurent, il n'y avait pas de villes ni de villages le long de la rivière. Ces lieux ne commenceront à apparaître qu'autour de 1870. Les camps de bûcherons n'étaient pas situés sur les rives du Saint-Maurice, mais bien sur celles de ses affluents.

Progressivement, le Saint-Maurice est emménagé pour que les pitounes puissent flotter jusqu'à destination. Des glissoires sont construites là où il y a des chutes. Avant tout, afin d'éviter que ce bois ne s'échoue sur les berges, il y eut la construction d'estacades, véritables trottoirs flottants et les pitounes étaient priées de marcher au pas entre ces objets. Nous verrons plus loin qu'il y avait des guides pour ce bois : les draveurs.

Les articles suivants ne sont que des brefs résumés d'une histoire très riche en textes et j'ai eu l'idée de les écrire après avoir lu, une autre fois, l'exellent ouvrage Forêt et société en Mauricie, par les historiens René Hardy et Normand Séguin.

LE FICHIER AUDIO : Le grand six pieds, par Claude Gauthier (1970) Notre géant est un homme des années 1950-60, car il peut se permettre de quitter le camp le samedi soir pour aller giguer ! Le Lac Saguay, nommé au début de la chanson, était le village natal de Claude Gauthier.

 


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1. jakin  le 01-07-2016 à 10:47:13  (site)

Bonsoir Mario, l'arbre de la première photo est énorme...ce n'est probablement que les branches qui sont entassées sur la deuxième photo ? Un rude métier....dans lequel il n'était pas bon de prendre une buche !

2. MarioB  le 01-07-2016 à 13:05:12  (site)

Oui, il est énorme. Peut-être que la photo a été prise pour le montrer. Ce qui m'étonne, sur cette photo, est que les hommes sont vêtus légèrement. Il s'agit sans doute d'une équipe estivale qui préparait les camps.

 
 
 
posté le 29-06-2016 à 16:24:16

Bûcherons 2 : Le campement

 

 

 

 

 

 

Avant de vous entretenir du campement, il sera question de la façon dont les hommes devaient s'y rendre. Au début (1850), cela causait un grand problème, car il n'y avait pas de route entre Trois-Rivières et les camps. La première façon a été la navigation, sur des chalands, avec les hommes, les animaux et le matériel. Pas qu'une mince affaire, car il fallait que le chaland avance à contre-courant. Ajoutons des chutes et des remous et vous aviez une aventure éprouvante.

Peu à peu, des chemins près des berges de la rivière ont été tracés, mais ensevelis par la neige au cours de l'hiver, boueux au printemps. Le train est arrivé au village des Piles au cours de la décennie 1880 : moins de la moitié du parcours. Une route davantage dans la norme est apparue dans la première moitié du 20e siècle, pour rejoindre La Tuque, la ville la plus au nord et la plus près pour desservir les bûcherons.

Le campement était une cabane en bois-ronds (Première photo). Au 19e siècle, ce lieu portait le nom de Cambuse. Il y avait un foyer central, où le cuisinier préparait les repas. Le long des murs : des couchettes, qui étaient avant tout des paillasses, avec des branches de sapin en guise de matelas. Ces "lits" étaient superposés, inconfortables, posés près du froid extérieur. Je vous signale que les chevaux habitaient aussi la cambuse ! Peu à peu, le cuisinier aura sa propre cabane, où les hommes prenaient leurs repas, alors qu'une autre était destinée aux travailleurs.

Un mot sur l'hygiène. Aucune préoccupation des compagnies pour cet aspect ! Les accidents étaient traités à la sauvette et il est arrivé que des bûcherons meurent des suites d'une blessure. Une part du folklore : nos courageux étaient plein de poux, car ils n'avaient à peu près rien pour se laver.

Tout ceci s'est amélioré avec les années, mais ces cabanes n'ont jamais été des lieux de confort. La seconde photo date des années 1940 et vous pouvez constater que c'était primitif. On voit les couchettes superposées, ainsi que quelques bûcherons.

LE FICHIER AUDIO : Noël au camp, par Tex Lecor. (I968) Un monologue classique où Tex se met dans la peau d'un "gars de bois" de 18 ans, obligé de passer Noël dans le camp de bûcheron (où il y a la radio, tout de même!) Il a la nostalgie des fêtes passées dans sa famille. Une entorse au règlement : notre homme a bû un peu d'alcool, alors que c'était interdit.

 


Commentaires

 

1. jakin  le 30-06-2016 à 10:56:28  (site)

Bonsoir Mario, passionnant toutes ses histoires sur les bucherons...des hommes au caractère bien trempé, mais avaient-ils le choix ?

2. MarioMusique  le 30-06-2016 à 12:17:36  (site)

Merci pour cet encouragement.

 
 
 
posté le 28-06-2016 à 16:40:50

Bûcherons 3 : L'ABC du bûcheron

 

 

 

QUI ÉTAIENT LES BÛCHERONS ?
La plupart étaient des cultivateurs pauvres, des colons, pour qui le maigre salaire touché dans un camp de coupe était le seul pendant la saison froide. Il devenait nécessaire pour la survie de la famille. Souvent, les hommes "montaient au chantier" en compagnie de leurs fils adolescents, parfois leurs grands enfants. Il y avait aussi des hommes journaliers, qui n'avaient pas de métier. En Mauricie, ils ne venaient pas tous de la région. Un bon bûcheron était un adulte dans la force de l'âge. Dépassé la quarantaine, les tâches devenaient difficiles.

LEUR NOMBRE. Le nombre d'hommes dans un camp variait selon les époques et la situation économique de l'employeur. Il existait des petits campements avec moins de dix hommes, alors que les plus imposants en comptaient une cinquantaine. Établir une moyenne de vingt-cinq me paraît plausible.

LEUR PAIE. Avant l'établissement d'un salaire de base commun, cela aussi tardivement qu'au cours des années 1930, ces hommes étaient sous-payés. La paie, mensuelle, était moindre que celle d'un ouvrier non qualifié travaillant dans une usine ou une manufacture. Les employeurs, sachant que ces hommes pauvres n'avaient d'autres alternatives que d'accepter, ne se privaient pas pour exploiter ces gens. Certaines entreprises payaient à la tâche, ce qui favorisait les plus costauds, mais créait de l'épuisement, des maladies.

LE TRAVAIL. Du lever du soleil jusqu'au coucher, avec de brèves pauses de quinze minutes pour les repas. Une équipe était formée de cinq hommes : deux bûcherons, ceux qui coupaient les arbres à la hache ou au godendard (Cette scìe à deux extrémités, qui l'on voit sur la photo). Un autre homme coupait les branches. Un quatrième chargeait les billes sur un véhicule à force chevaline, conduit par un cinquième, qui allait porter le tout près du lac ou de la rivière. Dans un campement, il y avait aussi un cuisinier, un forgeron s'occupant des outils et des chevaux, un homme à tout faire, puis un contremaître, qui supervisait les tâches et rendait des comptes à la compagnie.

LE MOMENT : La norme : de novembre à avril. Cependant, certains camps ouvraient leurs portes au début de septembre. Il n'y avait pas de travail le printemps et l'été ? Pas pour couper les arbres. Cependant, des hommes étaient engagés pour préparer l'hiver suivant, pour enlever les souches. Un espace d'arbres coupés faisait en sorte que le campement devait être déménagé (ou reconstruit) plus près de la forêt. C'était aussi plus facile d'emmener des chevaux et autres bêtes pendant l'été.

LE FICHIER AUDIO : Le Rêve du diable : Les voyageurs de la Gatineau + Chanson du voyageur (1976) Une formation folklorique puisant dans les chansons de jadis pour leur répertoire où on trouvait beaucoup de chansons de bûcherons et de chantiers. En voici deux, en un pot-pourri : la première provenait de l'Outaouais et la seconde du Saguenay. Très rustique, le Rêve du diable !

 


Commentaires

 

1. Jakin  le 29-06-2016 à 11:38:03  (site)

Salut Mario, cet air de chanson, je l'ai connu dans mon adolescence ou l'on chantait dessus "Quand Manon aller aux champs, la rirette, la rirette, en chemin elle rencontra trois jeunes et beaux garçons..." le reste est classé X....

2. MarioMusique  le 29-06-2016 à 12:14:01  (site)

Les chansons de folklore changaient souvent de paroles, de sens.

 
 
 
posté le 27-06-2016 à 13:20:27

Bûcherons 4 : Draveurs

 

 

 

Les draveurs n'étaient pas des bûcherons, mais il arrivait que certains de ces derniers travaillaient aussi à la drave. C'était davantage payé, mais beaucoup plus dangereux. Il arrivait souvent que des draveurs perdent la vie, surtout par noyade.

D'abord, l'origine du mot. De nouveau, une déformation d'un terme anglais : Driver, celui qui mène. Les billes de bois préparées par les bûcherons pendant un hiver étaient déposées sur le bord d'une rivière ou d'un lac, ou jetées sur le cours d'eau gelé. Quand le dégel se faisait sentir en avril arrivaient les draveurs, qui travailleront jusqu'en juillet.

Vous croyez que ces billes de bois allaient tout gentiment voguer vers le Saint-Maurice et se rendre jusqu'aux scieries ou près des usines de pâtes et papier de Grand-Mère, Shawinigan et Trois-Rivières ? Nenni ! Une rivière, c'est capricieux. Parfois, c'est profond et un peu plus loin pas du tout. Il y a des remous, des chutes et nos bonnes pitounes avaient tendance à s'échouer sur les berges. Le travail des draveurs consistait à ce que tout arrive à bon port.

Rappelons que si la rivière Saint-Maurice était l'autoroute de nos pitounes, il n'y avait pas de camp de bûcherons le long de ses rives. Ils étaient établis sur ses affluents. Les draveurs, à l'aide de perches, devaient les mener vers la rivière Saint-Maurice. Quand le courant était faible, ces hommes marchaient sur les billes de bois afin de les pousser. Parfois, il y avait des embâcles, comme sur la photo. De quelle façon tout remettre en ordre ? À la dynamite ! Un homme tenait les bâtons, allumait la mèche, puis fichait le camp à toute vitesse, courant sur les billes. Vous verrez une scène semblable dans le film de l'ONF que je vous propose, dans le dernier article de cette série.

Une fois sur le Saint-Maurice, les pitounes avaient leurs humeurs capricieuses et les draveurs devaient les remettre à l'ordre, pour qu'elles voguent entre les estacades. Ils avaient aussi comme mission de les placer dans les glissoires afin qu'elles ne se perdent pas loin de la rivière, lors du grand saut. Les draveurs accompagnaient les billes de bois et vivaient sous la tente.

Quand ces tâches dangereuses étaient terminées, les draveurs remontaient la rivière pour trouver des égarées, nettoyer les rebords des estacades et les glissoires. Ce métier est disparu quand le flottage du bois a été interdit par le gouvernement, au cours des années 1970.

LE FICHIER AUDIO : La drave, par Félix Leclerc (1957) Félix décrit très bien le travail difficile des draveurs. Cette chanson sera utilisée dans le film recommandé.

 


Commentaires

 

1. jakin  le 28-06-2016 à 11:41:58  (site)

Salut Mario, lors d'un séjour au Québec, dans la ville du même nom, j'ai vu passer de longs convois de troncs d'arbres sur le Saint Laurent, tiré par des bateaux.....

2. MarioMusique  le 28-06-2016 à 16:22:40  (site)

Oui, en effet. Si tu montes vers les régions du nord, comme l'Abitibi, les Laurentides, le Lac St-Jean, les billes sont transportées par d'énormes camions et tu en croises souvent, sur la route.

 
 
 
 

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