Mario Bergeron multicolore

Cependant, quand l'article qui n'existe pas existera, ce que j'écris actuellement deviendra l'article suivant et les gens pourront dire que ce que j'ai vécu au cours de ces quatre journées qui n'existent pas encore l'ont fatigué.

Vous comprenez ? Non ? Pfff...

Il y a des coins de la maison qu'il n'a pas encore vus, mais je garde les portes fermées. L'hiver est toujours avec nous, mais le jeune semble pressé d'explorer l'extérieur. Je m'y refuse, pour l'instant.

Le plus grand mystère pour Salomé est la chambre de bain. J'avais déjà évoqué qu'il était intrigué par la baignoire. Il l'est aussi par la toilette. Il s'y penche, examine. Je crois qu'il sait qu'il y a de l'eau à boire, mais qu'il est trop petit pour l'atteindre. Le lavabo est un objet beaucoup plus étrange. Il le regarde avec des yeux très ronds et fixes. Si je fais couler l'eau, il recule, effrayé. Ses yeux sont encore plus expansifs quand l'eau coule dans le trou. Je reviens à la baignoire. Il a rapidement réussi à la vaincre, s'y lancer avec un jouet, s'amuser, se frotter le dos (Je crois que tous les chats aiment ceci.) Mais il y a une douzaine de jours, alors que je fermais le robinet d'eau froide, j'ai entendu Salomé courir et j'ai eu à peine le temps de penser "Ah non, ce n'est pas vrai" que le châton se lançait athlétiquement dans l'eau. Splash ! Comme il est encore petit, il en a eu par dessus la tête, mais son initiation a été de courte durée. Jamais je ne pourrai oublier ce splash ! Spectaculaire !

Ci-haut, un magnifique vidéo TuTube présente les jeux de Salomé. Après une introduction commerciale où des Américains désirent nous vendre des chaudrons, vous verrez les épisodes suivants :

1 Course à l'emporte-pièce dans le couloir.

2 Course à l'emporte-pièce dans le couloir, suivi d'un dérapage sur le plancher de la cuisine.

3 Lance la souris dans les airs. Dix minutes consécutives.

4 Donne des coups de patte intempestifs pour saisir le cordon de chaussure.

5 Lance la baballe partout et la perd sous un meuble.

6 Séance hystérique avec la canne à pêche (Jouet avec un bâton de plastique, un fil qui y pend, terminé par une baballe pleine de dring drings et une plume. Salomé en est très friand.)

7 Le chat décide de jouer sur le lit au moment où je m'y couche.

8 Sauter d'un fauteuil à l'autre sans toucher le sol. Bong! Bong! Bong !

Je crois qu'on n'oublie rien, que tout ce qu'on a vécu est entreposé dans un fichier de notre cerveau. Parfois, cette puce s'active à un moment innatendu. La chose vient de se produire, en ce jeudi 10 mars, à 23 heures. J'étais en train d'écrire ma parcelle de roman, où mon jeune personnage fréquente mon ancienne école, le séminaire Saint-Joseph de Trois-Rivières. (Photo ci-haut)

Une phrase au début d'un paragraphe : "Je fréquente parfois la bibliothèque du séminaire..." Et j'ai laissé tomber le stylo, car dans mon esprit, j'ai vu cette bibliothèque, avec le comptoir près de l'entrée, les murs blancs, les deux portes avec l'horloge au-dessus. Vu tel quel ! J'ai aussi revu les escaliers à l'extérieur du lieu. Je n'ai pas mis les pieds dans cette bibliothèque depuis 1970, mais elle était pourtant vivante dans mon esprit, si bien que je me suis senti mal à l'aise. Qu'une phrase écrite et hop, la puce s'est mise en marche. Étonnant...

Je rappelle que l'idée pour ce roman m'est venue en travaillant aux articles que je vous ai présentés ici, à propos de l'Expo universelle Terre des Hommes, tenue à Montréal, en 1967. Pour les revoir ou les lire, cliquez sur le premier référant, le chiffre 67, tout en haut de la liste.

C'est l'histoire d'un garçon de treize ans, enfantin, mauvais étudiant, ne pensant qu'aux sports et à s'amuser, et qui a un coup de foudre pour l'Expo, lequel sentiment est partagé par une fille de son âge, Marie-Claire, plus mature que lui. Les deux vont tout mettre en oeuvre pour se rendre à Montréal le plus souvent possible afin de tout visiter. Ils voient l'événement avec des yeux émerveillés, une belle émotion. L'Expo fera basculer mon héros de l'enfance prolongée à l'adolescence, avec aussi la naissance d'un sentiment amoureux. Terre des Hommes lui fera aussi réaliser les splendeurs du monde entier, ce qui l'incitera, sans qu'il ne réalise, à devenir un meilleur étudiant.

Il me reste une soixantaine de pages à écrire. Je devrais donc terminer fin avril, début mai. Bien sûr, l'idée pour le roman qui va lui succéder est trouvée. Le titre provisoire est : L'amour et l'Expo. 

L'auteur Napoléon Caron était un jeune prêtre, flanqué d'un botaniste, d'un historien, et, de plus, linguiste. On lui doit l'entrée de Canadianismes dans les dictionnaires de France. Ce qui ravit, en lisant ce livre, c'est la qualité de sa plume. En 1888, il accompagne l'évêque de Trois-Rivières dans une tournée pour visiter les villages, cela jusqu'au nord de La Tuque, chez les Amérindiens atikamekv. L'année suivante, le prêtre entreprend un autre voyage, des Piles jusqu'à Trois-Rivières, en canot.

Ses carnets de voyage deviennent des livres, publiés au début de la décennie 1890. Ce qui illustré ci-haut est une réédition des deux textes en un seul volume, publié par Septentrion, en 2000. J'avais acheté cet ouvrage lors du salon du livre de l'Abitibi-Témiscamingue.

Le premier texte a un défaut : beaucoup trop de propagande catholique, avec des redondances, puis des passages sur les Atikamekv qui sont un peu douteux. Malgré ces tares, le texte est intéressant, à cause des rencontres des deux religieux avec les rares habitants, puis les descriptions de la nature. Il y est aussi question des curés qui visitaient les bûcherons dans des camps de coupe, cela dans des conditions très difficiles.

Le deuxième texte est plus riche, se concentre sur la nature, mais aussi sur l'histoire de la région. On sent chez Napoléon Caron un immense amour pour la rivière Saint-Maurice. Une lecture enrichissante et qui vaut le détour. L'extrait suivant m'a fait rigoler !

Les maringouins de la rivière Croche ne sont pas comme les nôtres ; j'oserais dire que ce sont des lourdauds, s'ils n'étaient pas si maigres et si fluets. Les nôtres ont des manières (...) ils sonnent loyalement la charge, et s'élancent ensuite vaillaimment à la curée. Ce sont aussi des maringouins d'expérience ; quand ils voient votre grosse main s'approcher d'eux, ils savent bien comprendre que ce n'est pas pour les flatter, et ils vont prudemment attaquer un autre point de la capitale. Mais ceux de la Croche ont tous l'air de maringouins sourds-muets ; ils se posent sur votre joue comme sur une écorce, sur votre nez comme sur un champignon, et se mettent aussitôt à se repaître en silence, comme de vrais écornifleurs. Vous les touchez du doigt, ils ne comprennent pas que c'est pour leur signifier de s'en aller. Vous en écrasez dix, vingt, trente, pas un des voisins ne prend la fuite, et dix, vingt, trente autres prennent la place de ceux qui viennent de trépasser.

Vendredi, je me rends pour la première fois dans le nouveau logis. Je me trompe d'étage et sors inquiet. "Ils ne l'ont pas mise là-haut, tout de même..." Là-haut, ce sont les cas extrêmes.

Eh bien oui, elle est à cet étage. Contente de me voir. Par contre, ce que j'ai vu là m'a beaucoup touché. Habitué de croiser des femmes qui marchent, parlent, sourient, j'ai vu des muettes par la force des choses, des gens incapables de marcher, une femme menue incroyablement fragile. Dans ce décor presque cauchemardesque, il y avait un homme volubile, porté à rire. Il y avait aussi un infirmier, que je n'avais jamais vu. Un costaud ! Un pensionnaire a eu à son endroit une mélopée de gros mots, parce qu'il ne voulait pas se faire nettoyer. Contrairement aux autres unités, on compte plusieurs hommes, dont un qui marchait à très petits pas et un autre qui roulait beaucoup. Bref, tout ceci était très démoralisant. J'ai alors pensé que c'était impossible que ma mère soit parmi ces gens.

En sortant, j'ai croisé une employée qui m'a dit exactement la même chose. Elle m'a aussi fait remarquer que l'infirmier travaillait à cet étage pour tempérer les humeurs parfois violentes des pensionnaires masculins.

Je fréquente cette maison depuis 2005, chaque semaine. Je puis vous assurer qu'il y a déclin... J'ai vu toutes sortes de choses étranges, mais d'autres amusantes. J'ai constaté que la mort était tout le temps présente, entre autres dans le cas d'une femme que ma mère aimait beaucoup, d'un homme qui était très rigolo, d'une femme qui m'avait bouleversé, car elle ressemblait à un Z et que c'était une personne intelligente et articulée.

La photo : ma mère et le perroquet Délima, de la zoothérapie.

Ah, au cas où vous pensiez une telle chose : oui, j'ai écrit un roman inspiré de ce milieu, mais en me concentrant sur les aspects positifs. Il n'a pas été publié, refusé quelques fois. Sans doute parce que les éditeurs ou le public ne désirent pas voir la vie de gens très âgés et qui ont besoin de l'aide d'autrui en toutes circonstances.

Je me suis senti comme un scout après avoir accompli ma B.A. Ceci me fait tant et tant peur, car avec ma vue très faible, qui sait si dans quelques années, je ne serai pas moi aussi avec une canne blanche, incapable de détecter le rebord du trottoir à cause de la neige ?

Alors, pendant une heure, j'ai écouté, posé quelques questions. J'ai dit ce qu'il espérait : oui, je suis intéressé. Quand tu passes au petit écran, tu deviens "Quelqu'un". Le cas contraire, tu n'es personne. Vendre des milliers de romans de plus ? Je ne crois pas que les gens regardant des feuilletons soient des lecteurs. Tout de même, ce roman, que j'ai toujours aimé, pourrait renaître et peut-être que tout ça m'apporterait une reconnaissance que j'ai toujours souhaitée.

L'homme m'a parlé d'une adaptation. Ce qu'il y a dans le roman ne pourrait être reproduit, entre autres parce que mon personnage Martin vieillit d'un chapitre à l'autre. Il faudrait un âge fixe, et aussi gonfler la présence de pesonnages féminins, comme sa mère et sa petite soeur. Par contre, les thématiques des chapitres demeureraient les mêmes. Droit de regard sur les scénarios qui seraient rédigés par je ne sais trop qui ? Oui, bien sûr.

Un contrat et une explication détaillée devraient cogner à ma porte cette semaine. Si je signe le document, la production se mettra en marche, avec la création des scénarios pour les douze épisodes, puis, l'an prochain, une production telle quelle, avec le choix des comédiens, des décors. Puis ce serait aussi tourné en 2017, le produit final pouvant être en boîte en 2018. À ce point, je me demande pourquoi vous lisez ceci, car c'est faux de A à Z.

Ah! Ah! Ah! Poisson de mars! Poisson de mars! Ah! Ah! Je vous ai fait marcher au poil, non ? Poisson de mars! Oh! Oh! Oh! et... quoi, avril ? Pourquoi, avril ? Je vous parle du poisson de mars et... Hein ? Vous êtes certains ? Ooooo... Zut! Pffff...

De ma rue : Daniel Lamy, un gringalet qui excellait à faire des grimaces très drôles. Daniel fut aussi un des rares dont l'amitié s'est prolongée au cours de l'adolescence. Ensuite : Normand Francoeur, qui était plus jeune que moi. Mon voisin ! Un petit bonhomme qui aimait les sports. Il y avait dans sa cour beaucoup de sable et avec la bande, on s'amusait à construire des villes pour faire rouler nos autos, nos camions.

Richard Saint-Pierre habitait le quartier, mais quatre rues plus loin. C'était un garçon un peu rude et batailleur, mais qui, à l'occasion, m'a servi de garde-du-corps contre les vilains cherchant à me bousculer. D'autres copains plus légers de ma rue : Pierre Tessier et Guy Marcotte.

Cependant, l'ami le plus profond a été Marcel Carignan. Peut-être parce qu'il était de ma taille ! J'aime beaucoup cette photo où je pose (à droite) en compagnie de Marcel. Nous devions avoir huit ou neuf ans. Vous savez quoi ? Marcel, je le vois toujous, je n'ai jamais cessé de le rencontrer. Une amitié qui dure depuis cinquante années, vous en connaissez beaucoup ?

Marcel a travaillé comme professeur de musique et est maintenant à la retraite. Daniel Lamy a aussi été impliqué dans le monde de l'éducation, dans la province de Nouvelle-Écosse, après avoir été un excellent comédien de théâtre amateur. Il désirait d'ailleurs devenir pro dans ce domaine. J'ai eu de ses nouvelles il y a une dizaine d'années, par courriel, alors qu'il venait de lire mon roman Contes d'asphalte, où il s'était reconnu. Je ne sais pas ce que sont devenus Richard et Normand.

Au cours de mon adolescence, je deviendrai ami avec deux gars de mon école, mais qui n'avaient pas attiré mon attention au cours de l'enfance.