Mario Bergeron multicolore

À beaucoup de points de vue, je prolongeais des activités de mon enfance, comme jouer au hockey dans la rue ou au baseball dans des champs d'infortune. En réalité, j'étais une extension du conservatisme de mes parents. Je me souviens que j'étais outré face aux gars qui portaient les cheveux très longs et que la "Musique underground", c'était du boucan, alors que les chansons du palmarès représentaient à mes yeux le summum musical. D'ailleurs, je n'achetais que des 45 tours.

Ce conservatisme était accentué par la fréquentation du séminaire Saint-Joseph, milieu archaïque où, à cause de mon ineptie à étudier, je me sentais minable face aux autres. Je ne me souviens pas de ce que je faisais en retournant chez moi. Regarder la télé avec mes parents, sans doute. Pas la moindre étincelle pour quoi que ce soit. Je vivais un peu coupé du monde.

Quand le séminaire m'a fichu à la porte, il y a eu une année à l'école publique, où j'étais plus vieux que les autres de mes salles de classe. Cependant, peu à peu, je me suis éveillé à certaines choses que j'ignorais. Un professeur de français, Côme Cossette, allait m'inciter à écrire une histoire, un roman. C'est à ce moment que le petit Mario allait devenir le contraire de ce qu'il avait été avant 16 ans. Voir le prochain article.

Pour mon cauchemar au séminaire, cliquez sur le lien suivant :

http://mario3.vefblog.net/6.html#Mario_et_le_semnaire

Je devais avoir 13 ans, sur cette photo, prise lors d'une tentative de camping.

Du roman initial, je suis passé à un second, troisième et ça n'a pas cessé. Il y a eu aussi le théâtre amateur, les premières sorties dans des bars et brasseries (Alors que je n'avais pas l'âge requis), à la conquête de mes nuits, aux décisions spontanées, aux moments pleins d'imprévus, au disque de rock hebdomadaire, à tout ce que je pouvais croquer, tout ce qui s'offrait à moi, incluant les interdits.

Chemin faisant, il y a eu des sentiments de partage, d'ouverture vers autrui, de curiosité ; des faits qui sont toujours miens aujourd'hui. Mario ado transportait encore sa valise d'enfance, mais avait ajouté un sac à dos jeunesse et je me déplace avec les deux en ce moment même, malgré une société de rectitude politique qui a cadenassé, chez beaucoup de gens, ces valeurs altruistes, pour les remplacer par des classifications entre le bien et le mal, comme le catholicisme qui parlait du diable et de Dieu.

L'on parle souvent "d'adolescence prolongée", surtout dans le cas des garçons. Je crois que j'ai été adolescent jusque dans ma vingtaine et que même lorsque je tenais un emploi à la station de radio CIGB-FM, j'étais prêt à toute capoterie se présentant devant moi.

Je crois que mon adolescence s'est terminée la nuit où le Rio a été détruit par un incendie.  Voir l'article sur le Rio, en cliquant sur ce lien :

http://mario3.vefblog.net/10.html#Le_Rio_de_TroisRivieres

Sur la photo, j'ai 16 ans. Elle avait été envoyée en même temps que mon premier roman dans le cadre d'un concours pour jeunes auteurs.

Me friser ? Avec les rouleaux, le séchoir électrique et tout le tra là là ? À la bonne vôtre ! Ce fut la fête des gloussements idiots de la part des gars, surtout quand ils m'ont vu avec tous ces rouleaux sur la tête. Cela n'empêche pas, tas de cons, que ces deux filles faisaient valser leurs doigts dans mes cheveux et non dans les vôtres ! Na ! Au fait, ma mère a été amusée par ce spectacle, mais pas réellement papa...

Voici le résultat ! Joli garçon, n'est-ce pas ? Comme si cela n'était pas suffisant, il fallait me montrer publiquement ! Hors les quelques amis me connaissant, cela n'a pas donné les résultats espérés, mais nous nous étions amusés pendant une soirée.

Le tout s'était déroulé dans un local adjacent à la cour de la maison familiale, qui servait de salon de détente pour les baigneurs, ou pour prendre un repas en cas de pluie. Il y avait un bar, un frigo, une télé, un tourne-disque. Ce lieu, éloigné de la résidence de mes parents, a vu cent ébats et folies de la part de ma bande. On pouvait y passer des nuits à écouter des disques de rock à tue-tête, à tâter le pétard, à boire de la bière, à déconner. Je crois que j'ai une dizaine de photos prises dans cette pièce !

À droite, sur la table : bouteille de bière et paquet de cigarette. Les observateurs avertis noteront que sur le mur, près de la petite enceinte sonore, il y avait l'affiche des pyramides vertes que l'on trouvait dans la pochette du disque Dark Side Of The Moon, de Pink Floyd. Sept antres adolescents sur dix avaient cette photo sur un mur !

Or, pour la saison 2016, la ligue avait décidé d'allonger le calendrier à 70 compétitions, donc, 35 locales. Optimisme! Mais quand j'ai vu l'horaire 2016, j'étais furieux : aucune rencontre en soirée. Zéro. D'ailleurs, j'ai croisé un joueur de l'équipe, pas du tout content de cette situation. "Nous aussi, on a chaud, monsieur Bergeron." 

Alors, je me suis tourné vers ce que je n'avais pas trop aimé, l'an dernier : le Midget A, niveau inférieur. Sur le bizarre site de Baseball Mauricie, j'ai eu la surprise de noter beaucoup de joutes en soirée pour cette équipe, aussi pour des Bantams (13-14 ans) et même pour une ligue senior (Adultes). J'en ai identifié 20 auxquelles je pourrais assister, sans compter celles de séries éliminatoires.

Alors, je m'y suis rendu mardi soir, pour oublier mon sentiment défavorable de 2015. C'était très bien, malgré des erreurs d'exécution. Bien car typique du baseball : Trois-Rivières perdait 7-0 après deux manches. Dans tout autre sport, c'est une défaite assurée. Pas au baseball. Oui, nous avons perdu, mais 9-8. Une remontée, en somme, de la part de jeunes qui ne laissaient pas prise.

J'ai vite noté qu'il y avait trois filles, au sein des deux équipes. Ce n'est pas interdit, mais pas trop courant. Habituellement, elles ne dépassent pas ce niveau, dans la hiérarchie. Il y en avait une toute petite, ce qui causait un problème au lanceur adverse, devant placer la balle dans un espace restreint. D'ailleurs, elle le savait et ne s'élançait pas.

La température était superbe, après une horrible chaleur d'après-midi. Je me suis surtout rendu compte que j'étais heureux, les fesses sur ces bancs inconfortables, à regarder, observer les parents et amis (Le seul public, à ce niveau de compétition) à caresser le chien familial d'une adolescente davantage intéressée à la lecture qu'aux performances de son frère. Par contre : pas d'annonceur maison, de musique, d'ambiance, mais aussi : aucun prix d'entrée. Pas de casse-croûte, mais on peut acheter ce qu'il faut dans l'aire de hockey bottine, tout près. 

Une autre rencontre est prévue en ce mercredi, mais la météo annonce de la pluie. 

Les plus jeunes seront étonnés de l'apprendre : une télé couleur de 1967, ce n'était pas tout à fait comme aujourd'hui. Il fallait ajuster les coloris. Si, si : il y avait un petit panneau avec des boutons à tourner selon les couleurs de base. Par exemple, une femme à l'écran pouvait porter une robe verte très vive et avoir un visage particulièrement pâle. C'était laid et il fallait alors ajuster. Parlant d'ajustement, il n'y avait pas de normes d'une chaîne à l'autre. Si vous aviez satisfaction lors d'une émission et que vous changiez de chaîne, c'était à recommencer. Les pires cas étaient les vieux films couleur. Affreux !

Mon père n'avait aucune patience et tournait tous les boutons sans réfléchir, si bien que nous pouvions voir un magnifique voilier blanc voguant sur un océan très turquoise fluo. L'automne venu, j'avais hâte de voir le hockey en belles couleurs. Bien sûr, nous savions que l'uniforme du Toronto était bleu, celui du Détroit rouge et que les joueurs de Montréal étaient vêtus de ces deux coloris. Sauf qu'en 1967-68, la Ligue Nationale de hockey accueillait six nouvelles formations et je ne savais pas trop quelles étaient leurs couleurs. Ainsi, pendant plusieurs mois, j'ai cru que Philadelphie portait le rouge, alors que plus tard, dans une revue, j'ai vu qu'ils étaient orangés.

Mon père a dû boxer ce téléviseur pendant deux années et quand, enfin, des appareils sans ce bidule furent disponibles, il en a acheté un et a descendu le modèle 1967 dans notre salle de loisirs. Il a été là pendant quelques années, car je me souviens qu'avec mes copains, on fumait quelques bons pétards dodus, on lançait un disque de Black Sabbath, puis on regardait un vieux film sans le son en changeant volontairement les couleurs. Voir un cow-boy avec un visage mauve et un cheval rouge était trippatif, très psychédélique. Une fois, mon père, revenant au milieu de la nuit de je ne sais où, nous avait surpris. Il avait gardé silence, avant de nous dire : "Ne brisez pas ma télé, les p'tit gars."

L'illustration : ce papillon coloré était le symbole de la télé d'État dès l'apparition d'une programmation en couleurs.

Oui, il joue encore comme un dingue. Il y a trois jours, il prenait le couloir pour une piste de course et comme il n'arrêtait pas et que ça m'énervait, je me suis penché pour lui bloquer la route. Vous savez ce qu'il a fait ? Il a sauté par-dessus moi ! Athlétique, hein !

Né en novembre 2015, il y a des choses qu'il n'a jamais vues. Comme dans le cas de tous mes autres chats, je le sors en laisse. Sauf que monsieur Salomé a semblé d'abord craintif, refusant de descendre jusque dans la cour. Après lui avoir donné un coup de main, il ne s'est aventuré nulle part. En entendant une auto passer, il a eu peur. Depuis, progressivement, il prend ses aises.

Le moment définitif s'est peut-être passé samedi. Le p'tit a découvert une nouveauté : des insectes, autant volants que rampants. Il en a capturé un d'un coup de patte et l'a avalé. Gloups ! Il a aussi vu un oiseau sur la corde à linge, ce qui l'a beaucoup intrigué, mais il n'a pas cherché à approcher. Après plus d'une demi-heure dans la cour, j'ai décidé que j'en avais assez et je l'ai pris pour remonter, mais il n'était pas d'accord. Houlà! NON SALOMÉ ! NON ! Ceci, il le comprend.

Ah, j'oubliais, pour une deuxième fois de sa vie, il s'est précipité à pleine vapeur tête première dans la baignoire. Splash!

Je crois que je n'ai jamais été aussi étonné de ma vie. Chaque être humain sait très bien que la chose peut se produire un jour, mais on pense souvent que ça n'arrive qu'aux autres, et non à soi.

J'avais pourtant lu le témoignage de l'homme de science Ugalda Grabarkewitz, ayant fait un face à face en novembre 1947. Est-ce que vous ceci vous est déjà arrivé ? À des parents, des amis ? De quelle façon ont-ils réagi ? Notez bien que pour ma part, le tout n'a pas duré longtemps. Moins de dix minutes, mais en rentrant chez moi, je n'arrivais pas à chasser cette vision. Un peu de repos me fera du bien, mais je sais que jamais je n'oublierai ce que j'ai vu.

Parce qu'en mai 1998, j'ai eu un coup de foudre pour ce salon, pour le public de cette région. D'année en année, j'étais présent, et même en 2004, alors que je n'avais plus d'éditeur. Il y aura donc eu six années de silence abitibien pour moi et je ne pouvais m'empêcher de penser, à chaque mois de mai, que j'aurais pu être là-bas.

Mardi le 25 mai 2010 : il fait trrrrès chaud ! Température idéale pour de l'insomnie. Et voilà ! Le tour est joué ! J'ai dû dormir trois heures, pas plus. Je ne sais trop pourquoi à sept heures le mercredi matin, j'étais dans le parc de mon quartier à boire du café et à écrire un bout de roman. En arrêtant, j'ai pensé que beaucoup plus tard dans la journée, je serais à l'autre bout du Québec, dans une chambre d'hôtel.

L'autobus pour l'Abitibi avait son point de départ au terminus de Montréal. Alors, j'ai refait le trajet emprunté des centaines de fois dans ma vie : Trois-Rivières/Montréal. La photo ci-haut : le terminus de Trois-Rivières, vers 10 heures. Le véhicule arriverait quinze minutes plus tard. J'aime bien l'homme avec le chien.

Anecdote : je mentionnais ce passage de roman écrit au parc. Je ferai la même chose à Montréal, à Mont-Laurier et à Val d'Or.

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